Anna Yon Yue Chong, une championne entre rigueur et humilité
Championne du monde aux World IBJJF Master No-Gi en ceinture mauve, Anna Yon Yue Chong incarne une pratique du combat à la fois exigeante, réfléchie et profondément humaine. Entre maîtrise technique, humilité face à la performance et transmission aux plus jeunes, elle revient sur sa dernière victoire internationale, son rapport au haut niveau et ses projets à venir, portée par la fierté de représenter le Fenua sur les plus grandes scènes sportives.
Parole à Anna Yon Yue Chong :
Comment s’est passée ta dernière compétition ?
« Je viens de remporter l’or aux World IBJJF No-Gi. J’ai affronté directement la championne du monde en ceinture mauve Master 2 Super Heavy, avec un gabarit bien plus imposant que le mien. Ma stratégie était claire : éviter de me retrouver au sol sous elle. Je me suis appuyée sur mon expérience de la compétition et sur mes bases en boxe thaïe pour rester stable debout. Sur une tentative de balayage ratée de sa part, j’ai décalé, pris son dos, puis l’ai amenée au sol en restant au-dessus. J’ai contrôlé, mis la pression et attaqué un bras pour détourner son attention, avant d’enclencher ma soumission favorite, le jujigatame, sur son autre bras. C’est passé, je suis championne du monde. Les Open Weight étaient mon objectif principal. J’ai été sortie sur une clé de cheville par une adversaire que je connais bien, et qui a ensuite perdu face à ma précédente opposante, laquelle a remporté l’or des Open, c’est donc elle la grande gagnante du championnat. Un scénario très “pierre-feuille-ciseaux” : les styles comptent énormément, fonctionnent sur l’une mais pas sur l’autre, il faut savoir adapter. »
Qu’as-tu ressenti et qu’est-ce qui a fait la différence ?
« Face à une adversaire beaucoup plus grande et plus lourde, habituée du no-gi, je ne pouvais pas jouer la force, mon style préféré. J’ai misé sur la patience, le timing et la diversion. Je ressens une grande fierté, bien sûr : j’ai ma place parmi les meilleures de ma division. Je ressens aussi beaucoup d’humilité : se faire sortir en une minute sur une clé de cheville fait rester sur terre, tout peut basculer très vite, une médaille d’or ne préserve de rien. »
Avec l’âge, es-tu dans la transmission ou toujours dans la “gnaque” ?
« Après des années de boxe thaïe, de ball-trap et de jiu-jitsu, j’ai une approche plus mûre du combat. J’ai fait énormément de compétitions ; aujourd’hui, gagner ou perdre compte moins que le plaisir et le sentiment de progresser. Je ne me projette pas vraiment dans l’enseignement classique. Ma manière de transmettre, c’est plutôt d’être présente : servir de cobaye à l’entraînement, accompagner les jeunes à l’international et sur le plan administratif, être là sur les compétitions, faire les Open en fin de journée. Montrer l’esprit de compétition et l’esprit collectif. Et paradoxalement, ce sont surtout eux qui me font progresser. Sur le plan technique, ils ont énormément à m’apprendre. »
Tes projets pour le premier semestre 2026 ?
« Cela fait trois ans que j’enchaîne compétitions internationales et camps d’entraînement, en boxe thaïe comme en jiu-jitsu. Pour début 2026, ma priorité est de prendre soin de mon corps et de mon esprit, de soigner les blessures et de progresser techniquement. Si l’opportunité se présente, je participerai aux Championnats d’Europe Master en BJJ. La boxe thaïe viendra plus tard : cette discipline demande au moins trois semaines de camp intensif à 100 % en Thaïlande, ce que je ne peux pas caler pour le moment. »
Que penses-tu du programme Ambassadeur Air Tahiti Nui ?
« Je trouve ce programme formidable. Il permet d’accompagner sportifs, artistes et associations, de donner de la visibilité à leurs domaines, et de faire rayonner la Polynésie à travers leurs parcours. La compétition internationale demande beaucoup d’engagement, humain et financier. Pouvoir compter sur un tel soutien fait une vraie différence. C’est un privilège de représenter le Fenua et Air Tahiti Nui. Mauruuru roa Air Tahiti Nui ! »